Infection: 4

    Un bruit de verre cassé parvint aux oreilles des médecins, depuis le couloir. L'infirmière, affolée, devant le suicide de son patient, venait de faire tomber sur le sol une bouteille de liquide physiologique.

    L'équipe médicale, qui pensait jusqu'alors que la mère pleurait la mort de son enfant, comprit que le décès n'était pas seulement dû aux suites d'une allergie ingérable.

    Le docteur Arnot, chef d'équipe, se précipita avec un flegme très professionnel dans la chambre du défunt.

    Le scalpel meurtrier était toujours vissé dans l'oeil de la victime, qui avait laissé reposer son unique main inerte sur sa blouse d'hôpital souillée de sang. Dans ce suaire, Monsieur-tout-le-monde pourrait reposer en paix. Tout son corps semblait apaisé. 

    Alors, qu'était-ce que ce bourdonnement obscène ? Son rythme cardiaque ne donnait plus aucune impulsion électrique et les monitors s'étaient tus.

    Le vrombissement ne venait pas d'une machine. Mais ... de son oreille. Comme si une abeille y logeait. Comme si un insecte d'une vigueur anormale y butinait ses chairs meurtries, dans cette étrange corolle.

    Arnot, curieux, surmonta son dégoût pour extraire avec une pince à épiler la forme duveteuse qui se logeait près du tympan de son patient. C'était presque un caillot de poils et de sang mêlé.

    Soudain, la bestiole émit un sifflement strident, et le médecin, surpris, en laissa échapper sa prise. L'insecte s'envola et quitta la pièce si rapidement que la vieille femme et la jeune infirmière n'eurent pas le temps de déterminer à quelle espèce la bestiole appartenait.

    Dans la salle d'opération, non loin du théâtre de cette péripétie, un gémissement semblable aux pleurs d'un bébé se fit entendre. Il provenait du cocon que trois autres membres de l'équipe essayaient de disséquer.

    Un vagissement... comme si la créature en devenir, à l'intérieur de cet oeuf de chair, appelait sa mère.