Les coquelicots étaient nombreux cette année, plus éclatants que tous les printemps précédents.
Elle ne se rappelait pas en avoir vus de plus rouges, de plus lumineux. Taches écarlates sur des champs couleur vert paille.
La fleur éphémère affrontait la nature hostile de cette partie du pays qui n'était ni le Nord, ni la région méditerranéeenne. Un couloir, balayé par le Mistral, cet adversaire ancestral de toute une race d'habitants fiers qui s'obstinaient à vivre là.
Elle ne savait pas pourquoi elle était restée. Son coeur était longtemps resté atrophié; il semblait désormais vouloir à nouveau s'épanouir, comme ces fleurs sauvages qui envahissaient sa solitude.
Elle se souvint du tableau d'un peintre célèbre. Qui était-ce, déjà ? Oh, et puis, quelle importance cela faisait. Un artiste avait perçu la beauté oppressive que provoquait la vue de ces champs rouge sang, qui enfouissaient la ferme grise sous leur tapage visuel.
Dans ce paysage, avait-elle sa place, elle ? Les lieux étaient abandonnés à la sauvagerie de la flore. Elle y était seule. Depuis qu'elle avait perdu Rolland...