Depuis que Sylvie m'a communiqué les résultats de la dissection scientifique de ma calebasse, je ne me fais plus d'illusions. Je continue à ressentir les méfaits de l'envoûtement auquel je me suis, malgré moi, exposée.
Aucune drogue hallucinogène dont les effets pourraient être contrés. Aucun antidote. Je rejetai Sylvie, qui par sa trahison m'avait ôté tout espoir de guérison.
La calebasse contenait de la poudre d'ivoire. Mais il ne s'agissait pas de fragments de défense d'éléphant, comme l'on avait songé d'abord. Un collier de dents. Humaines. En somme, ce collier tribal n'était pas un objet de parement, c'était un reliquaire.
Je voulais détruire la calebasse par le feu, afin de retrouver mon intégrité: c'est alors que je m'aperçus de sa disparition. Thierry avait-il été contacté par Sylvie ? Mes amis avaient peut-être voulu me libérer de l' emprise de ce talisman. Mais l'objet restait intact, hors de portée. Et son influence mortifère perdurerait. Tant que je ne l'aurais pas détruit. Ce que je ne pouvais plus faire ...
Je pleurai de rage, dans mes derniers instants de lucidité, en comprenant que j'ignorais comment guérir ? Qui pourrait m'aider, quand j'avais repoussé les seules personnes auxquelles j'étais chère ? Quand je ne devins plus capable de reconnaître quiconque ?
Je restai seule avec moi-même. Puis je devins peu à peu étrangère à ma propre vie. N'avais-je pas senti que cela finirait par se produire ? Je me souvenais vaguement d'avoir prévu un ultime secours. Ce cahier gris, peut-être, noirci de lignes et de lignes d'obscurs dessins.
Pour me rappeler qui j'étais, encore aurait-il fallu savoir les déchiffrer. Mais avais-je seulement un jour appris à lire ?
Pour toi.
Gassi !
C'en est fini.
Fadema FuDDade !
Pour moi, une nouvelle vie commence.